Les propositions de la CFE-CGC reçues par Madame Sophie CLUZEL, Secrétaire d’Etat personnes en situation de handicap.

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Jeudi 9 NOVEMBRE 2017

Quelles pistes d’amélioration des démarches d’accès et de retour à l’emploi des travailleurs handicapés ?

 

Audition du Secrétariat d’état en charge du handicap

Jeudi 9 novembre 2017

 

Faisant sien la demande des personnes concernées d’« accéder à un emploi et travailler comme les autres », le gouvernement s’est notamment fixé deux grands objectifs :

-          faciliter l’embauche et le maintien en emploi des personnes handicapées par les employeurs publics et privés dont les TPE-PME ;

-          augmenter le niveau de qualification des demandeurs d’emploi et des salariés handicapés.

 Il entend mobiliser en ce sens prioritairement les réponses de droit commun, et favoriser notamment l’accès des personnes handicapées à l’apprentissage et la formation professionnelle dans le cadre des réformes qu’il engage.

 Je souhaite ainsi vous rencontrer afin de partager notre ambition de changer le regard sur le handicap pour construire une société réellement inclusive, et identifier des pistes d’amélioration des démarche d’accès et de retour à l’emploi des travailleurs handicapés, mais également en matière de santé et qualité de vie au travail.

 I/ les fonds dédiés à l’accès et au maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap

 Sécuriser les fonds

 Le système de financement de l’accès et du maintien en emploi des personnes en situation de handicap par les fonds Agefiph et FIPHFP n’est plus viable. En effet les entreprises et les administrations versent moins de contributions puisqu’elles remplissent de plus en plus leur obligation d’emploi. Dans le même temps, plus de personnes en situation de handicap sont embauchées, donc il y a davantage de demandes de financement de maintien dans l’emploi. Les fonds s’épuisent.

 Sécuriser les fonds c’est tout d’abord faire en sorte qu’il n’y ait pas de dérogation aux contributions de ceux qui ne respectent pas l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

 A cet effet nous souhaitons soulever le point suivant : pourquoi, au FIPHFP, le ministère de l’Éducation nationale (qui est un des plus importants en nombre d’agents, avec 1 million de fonctionnaires), reste-t-il exonéré de sa contribution, alors que les réserves du fonds indiquent clairement la nécessité de revoir la politique handicap dans la Fonction publique ?

 Par ailleurs nous soulignons également une exonération de contribution des universités au FIPHFP, d’un montant de 30 millions d’euros, pour sécuriser les universités par des services de sécurité privée, au regard de l’état d’urgence. Cette décision n’a pourtant aucun lien avec la politique handicap. Les fonds FIPHFP et Agefiph ne doivent pas servir de variables d’ajustement des politiques publiques.

 Enfin, nous attirons l’attention sur des ponctions financières utilisées pour des politiques publiques qui n’ont rien à voir avec le handicap : trois fois 29 millions d’euros ont été ponctionnés sur les deux fonds durant trois ans.

 Sécuriser les fonds c’est également trouver un système de financement des fonds qui soit pérenne, tant pour l’Agefiph que le Fiphfp.

 La CFE-CGC s’interroge sur les résultats de la mission IGAS chargée chargé d’une mission à ce sujet.

 Pour la CFE-CGC le taux de 6% n’est plus adapté à la réalité de la reconnaissance des situations de handicaps. Aujourd’hui, 9% de la population souffre d’un Handicap. La CFE-CGC propose que le taux d’emploi dont doivent s’acquitter les entreprises et les administrations, soit cohérent au regard de la proportion de personnes en situation de handicap.

  Maintenir la distinction entre l’Agefiph et le Fiphfp

 Nous ne pouvons imaginer un rapprochement ou une fusion/absorption entre le FIPHFP et l’Agefiph.

 En 2005, lors de la création du FIPHFP, le législateur avait résolument écarté cette idée. Cependant, le FIPHFP et l’Agefiph ont depuis, souhaité travailler ensemble de façon à offrir aux demandeurs d’emploi handicapés une réponse unique, quel que soit le financeur.

 L’Agefiph met à disposition du FIPHFP son offre de service dans des grands domaines de son intervention. Les singularités de chacun des deux fonds ne sont aucunement un frein à l’efficacité des dispositifs conduits. Elles permettent de couvrir un plus large spectre d’actions vis-à-vis des bénéficiaires, dont les intérêts demeurent au cœur des préoccupations.

 

Aujourd’hui, il n’est pas possible, au regard des différences entre public et privé et des réalités financières des deux fonds, de proposer une fusion ou absorption.

 Chacun des deux fonds doit continuer à œuvrer avec ses spécificités, et surtout, conserver « son guichet » unique, son modèle RH en matière de handicap.

  

II/ Agir en prévention : Empêcher que le travail ne conduise à un handicap 

Prévenir l’épuisement professionnel

L’épuisement professionnel conduit à une incapacité de travail pour celui qui en est victime. L’individu a brulé toutes ses réserves et se sent totalement épuisé et découragé.

A cet effet :

 La CFE-CGC propose d’inscrire le thème de la prévention de la charge de travail dans la négociation annuelle obligatoire portant sur l’égalité hommes-femmes et la qualité de vie au travail.

Il est également nécessaire d’inciter les entreprises et la fonction publique à développer des outils de vigilance quant au respect des temps de repos, d’alertes en cas de surcharge de travail, et de former le management aux outils de régulation de la charge de travail.

Pour la CFE-CGC, il est également important de sensibiliser les dirigeants et directeurs des services de l’administration  à donner à la hiérarchie intermédiaire, les moyens d’agir en prévention et en régulation de la charge de travail, afin que le management ne soit pas lui-même « victime » de la mise en œuvre d’une politique de régulation de la charge de travail. 

Par ailleurs, la CFE-CGC demande à ce que l’épuisement professionnel soit intégré à un tableau de maladie professionnelle. Cela inciterait les entreprises et la fonction publique à agir en prévention du syndrome, pour ne pas voir leur cotisation AT/MP augmenter.

  III/ Permettre un meilleur accès à l’emploi des personnes en situation de handicap

Le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale : environ 500 000 demandeurs d’emploi en situation de handicap sont inscrits à Pôle emploi. Ils représentent en 2017, 8,7% de l’ensemble des demandeurs d’emploi.

 Non à la réduction des contrats aidés !

Le gouvernement prévoit une réduction du nombre de contrats aidés, qui passera en 2018 à 200.000 contrats, contre 280.000 en 2017.

Or, les contrats aidés sont un outil d’insertion professionnelle non négligeable pour les personnes en situation de handicap.

Les demandeurs d’emploi handicapés figurent parmi les principaux bénéficiaires de ces contrats et leur proportion parmi les bénéficiaires de contrats aidés ne cesse d’augmenter depuis 2012 : 9,2 % en 2013, 10,2 %, en 2014, 11,2 % en 2015 et 11,4 % en 2016.

Par ailleurs, bon nombre des emplois effectués en contrats aidés permettent le développement d’une société plus inclusive : Auxiliaire de Vie Sociale, Accompagnants des Elèves en Situation de Handicap, etc.

En outre, la suppression de contrats aidés met en péril de nombreuses associations et collectivités territoriales qui y avaient recours. 

C’est pourquoi la CFE-CGC s’oppose à cette réduction du nombre de contrats aidés.

 

Développer un accompagnement spécifique à l’insertion professionnelle des cadres en situation de handicap

S’agissant de la population de l’encadrement, les problématiques d’insertion dans l’emploi sont spécifiques, que ce soit du point de vue du handicap (accompagner le handicap psychique lié à l’épuisement professionnel par exemple), ou des caractéristiques des personnes (plus diplômées et plus âgées que la moyenne des demandeurs d’emplois en situation de handicap).

 Une aide spécifique doit donc être apportée à ces problématiques particulières.

 La CFE-CGC propose de mettre en place un nouvel acteur spécialisé dans l’accompagnement des cadres en situation de handicap, en mettant en place un dispositif conventionnel entre l’APEC et l’Agefiph, pour le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’emploi handicapés de l’encadrement.

 

Développer l’accompagnement du handicap psychique

 Le handicap psychique est, d’après l’OMS, la première cause d’arrêt de travail, et, selon les prévisions de cette même organisation, en 2020, 33 % de la population française sera touchée, au moins une fois dans sa vie, par un trouble de santé mentale.

Depuis de nombreuses années le travail lui-même est à l’origine de handicap psychique.

Le stress chronique associé à des surcharges émotionnelles est à l’origine de nombreux cas d’épuisement professionnel, principalement au sein de la population de l’encadrement. Les malades victimes d’épuisement professionnel présentent des troubles cognitifs, de perte de mémoire et troubles de la concentration qui vont rester séquellaires et qui nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire pour pouvoir revenir dans le monde du travail.

A la date d’aujourd’hui, nous constatons que ces salariés et agents de la fonction publique, victimes d’épuisement professionnel, sortent des effectifs du personnel après une période de longue maladie et passent en invalidité. Pour la CFE-CGC, il est inconcevable que les cadres, les enseignants, les policiers les plus investis dans leur travail subissent une mort sociale.

Nos entreprises et administrations doivent apprendre à maintenir en emploi les salariés qui ont été détruits psychiquement par le travail. Ce retour en emploi  demande l’aide combinée des services de santé au travail et des opérateurs spécialisés dans l’accompagnement.

Le dispositif d’emploi accompagné constitue un succès dans l’accompagnement et le maintien dans l’emploi des personnes ayant un handicap psychique.

 La CFE-CGC propose donc de développer une montée en compétence des professionnels de l’emploi accompagné, dans l’accompagnement du handicap psychique.

 Cela peut passer par l’incitation faite aux préfectures de région, d’intégrer des critères d’expertise dans l’accompagnement du handicap psychique, par le biais des ARS et des DIRECCTE. En effet ces dernières peuvent demander un tel critère d’expertise lorsqu’elles établissent les appels à candidature des personnes gestionnaires du dispositif d’emploi accompagné.

 Développer les compétences des conseillers / coachs

Une étude relative à l’emploi accompagné des personnes en situation de handicap psychique ou mental elève que les compétences des conseillers des dispositifs expérimentés en France, sont inférieures à celles observés au Quebec ou aux Pays-Bas.

Des compétences sont nécessaires pour faire face aux relations avec les professionnels de santé, pour développer une relation de proximité avec la personne accompagnée, pour gérer la stigmatisation, ou encore les relations avec l’employeur.

Pour renforcer ces compétences, la CFE-CGC soutient la proposition issue de cette étude : développer des formations spécifiques. (Par exemple, former à la gestion de la stigmatisation et de l’auto-stigmatisation).

Développer les contrats d’apprentissage et de professionnalisation

Les contrats d’apprentissage et de professionnalisation permettent aux personnes en situation de handicap de s’insérer plus facilement et plus durablement dans l’emploi.

Cependant, la part des travailleurs handicapés dans l’ensemble des entrées en contrats d’alternance  est très marginale.

 Il faut donc donner la priorité au développement des formations en alternance. Cela doit s’illustrer par des résultats concrets et quantifiables, avec une obligation imposée par l’Etat de faire progresser les contrats de professionnalisation et les contrats d’apprentissage.

 IV/ Le Maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap

Faciliter la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) pour l’ensemble des demandeurs d’emploi en situation de handicap

Afin de faciliter l’accès à l’emploi des demandeurs d’emploi handicapés ayant majoritairement un faible niveau de qualification et une moyenne d’âge élevée, la CFE-CGC préconise de faciliter la reconnaissance des compétences et qualifications qu’ils ont développées au cours de leurs expériences professionnelles. Il s’agit donc de leur faciliter l’accès au dispositif de Validation des Acquis de l’Expérience.

 La CFE-CGC demande à ce que soit financé au moins partiellement, pour les demandeurs d’emploi en situation de handicap : 

  les droits d’inscription et de validation,

  • des actions d’accompagnement, 
  • des formations éventuellement nécessaires à la validation totale de la certification visée.

     

    En effet, seule la validation complète de la certification apporte une réelle plus-value à la personne pour son insertion sur le marché du travail, et celle-ci nécessite le plus souvent des actions de formation complémentaires (notamment pour l’accès aux certifications d’un niveau élevé de l’enseignement supérieur).

     

    Faciliter la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) pour les personnes de l’encadrement  en situation de handicap

    Les personnes de l’encadrement en situation de handicap constituent une population qui n’est pas prioritaire à l’accès à la VAE car en moyenne plus diplômée que l’ensemble des demandeurs d’emploi en situation de handicap.

    Cependant, leur handicap survient pour bon nombre au cours de leur carrière professionnelle. Ils bénéficient donc d’une expérience professionnelle qu’il faut valoriser pour leur permettre par la suite de retrouver plus facilement un emploi. D’autant que la survenance du handicap au cours de leur carrière professionnelle, conduit à ce que la population de l’encadrement en situation de handicap est en moyenne une population plus âgée que la population des demandeurs d’emplois en situation de handicap, et donc en difficulté face à l’accès à l’emploi.

    La CFE-CGC demande donc à ce que les cadres atteints d’un handicap au cours de leur carrière, puissent bénéficier de la VAE au même titre que des personnes en situation de handicap en moyenne moins diplômées.

     Faciliter le recours au télétravail pour les personnes en situation de handicap

    Afin de réduire la fatigue liée aux transports et de compenser le handicap, La CFE-CGC demande à ce que les personnes bénéficiant de la RQTH et dont les tâches le permettent, puissent accéder de droit à un jour de télétravail par semaine.

    V/ Aider les aidants

    Il est également indispensable d’agir pour que les aidants des personnes en situation de handicap puissent concilier leur rôle d’aidant avec leur vie professionnelle. 

    Les aidants familiaux salariés sont trop souvent confrontés à l’obligation dramatique de choisir entre leur position d’aidant et leur situation professionnelle, avec tout ce que cela entraîne au point de vue de l’absentéisme, de la perte de rémunération, de l’hypothèque sur la future retraite…

    La CFE-CGC demande à ce que la situation des aidants soit impérativement abordée lors des négociations d’entreprise sur le handicap.

    La CFE CGC demande également à ce que, lors du passage à temps partiel d’un aidant, les cotisations sociales de l’employeur soient maintenues sur la base d’un temps plein.  

     

À propos de Christophe ROTH

Délégué National Santé au Travail et Handicap Confédération CFE CGC
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